Loïc Le Ribault , parcours d’un savant
Je vous résume la carrière du docteur ès sciences Loïc Le Ribault : À l’âge de 24 ans, ce surdoué invente l’exoscopie (méthode hyperpointue d’utilisation du microscope électronique à balayage) et devient le premier spécialiste mondial en la matière. Le voici parcourant la planète pour de nombreuses missions.
Mais Le Ribault est un patriote doté de sens civique (comme c’est bizarre !). Il veut d’abord servir son pays et il offre donc ses services à l’État, suggérant la création d’un laboratoire national d’expertise. Faut-il être naïf ! Les cloportes des ministères n’opposent que silence ou mépris aux projets qu’il leur soumet. Il crée alors son propre laboratoire (le C.A.R.M.E.) qui connaît dans les années quatre-vingt-un succès foudroyant, car de nombreux juges d’instruction (qui peuvent choisir leurs experts), déçus par le travail des services publics (est-ce possible ?), se fient à Le Ribault. Il devient un expert apprécié et il est mandaté dans les enquêtes sur les plus grandes affaires criminelles (Action directe, Époux Carty, Tuerie de Huos, Simone Weber, le petit Grégory, Chanal...). Son laboratoire emploie une trentaine de personnes. Et Le Ribault, ne songeant qu’à être utile, va former gratuitement plus de 1 500 policiers, gendarmes et magistrats aux techniques des prélèvements d’indices. Il devient presque célèbre et la presse le consacre « rénovateur de la police scientifique française ».
Mais les serviteurs de l’État peuvent-ils admettre qu’un laboratoire privé remplisse les devoirs qui incombent à la puissance publique ? Non, bien sûr. Alors ils se mettent au travail et rénovent leurs méthodes d’investigation. Comment ? En copiant les techniques de Le Ribault et en allant jusqu’à contrefaire l’un de ses instruments, le « tamponnoir » (toujours utilisé sans versement de droits à son inventeur, malgré son brevet). Du coup, les commandes au C.A.R.M.E se raréfient brutalement et Le Ribault est vite ruiné.
Mais notre homme a découvert entre-temps les vertus curatives du silicium organique. Il travaille avec le chimiste Norbert Duffaut, qui a fait la même découverte, et tous deux perfectionnent leur produit mais on leur refuse sans raison l’AMM.
Duffaut décède. Le Ribault continue seul et met au point le G5, assimilable par voie interne ou externe. Il le propose aux patients affligés d’arthrose, de rhumatismes articulaires, d’eczéma... Et c’est encore un succès foudroyant. Tout le monde en veut dans le Sud-Ouest. Plainte de l’Ordre des médecins et de celui des pharmaciens de la Gironde (Pas une seule plainte de patient mais des centaines de témoignages de reconnaissance).
Un juge d’instruction zélé emprisonne le bienfaiteur à Gradignan en 1997. La Chambre d’accusation le libère après 65 jours de prison. Un ami policier le prévient peu après qu’on va l’arrêter de nouveau. Il s’enfuit aux Antilles. La police soumet sa mère de 85 ans à un interrogatoire de 5 heures. Elle meurt quelques jours plus tard. Désormais, Loïc Le Ribault hait la France. Qui ne le comprendrait ? Exilé en Irlande, il crée une entreprise pour commercialiser le G5 par correspondance. Et c’est encore un énorme succès. L’État français lance contre ce dangereux criminel un mandat d’arrêt international. Le Ribault commet l’imprudence d’aller en Suisse où il est arrêté en novembre 2003, puis extradé après deux mois de prison et son procès vient de se dérouler à Bordeaux. Le jugement sera rendu le 12 février.
Les médias ont mis Le Ribault à la une. Le 20 heures de TF1 lui a consacré le 4 février un reportage se terminant sur une histoire d’expertise de tableau totalement farfelue. Le 5 février, Canal+ à 12 h 45 et FR2 à 20 heures ont fait beaucoup plus sérieux et « Le Monde » lui a consacré une page entière le même jour. Si Le Ribault est condamné, malgré les immenses services rendus au pays, nous saurons que la France est gouvernée de fait par l’Ordre des médecins. Ce qui expliquerait qu’elle soit si malade...