La mémoire implicite plus forte que la
maladie d’Alzheimer ?
Par Caroline
Lepage - Futura-Sciences, le 18/06/2004 à 09h01

Des chercheurs de l’Université de
Washington, à Saint Louis, viennent de découvrir que la
maladie d’Alzheimer n’endommage pas toutes les formes de
mémoire : un espoir pour la rééducation des patients dans le
futur.
La maladie d’Alzheimer est une pathologie neuro-dégénérative
qui touche 5% de la population des plus de 65 ans, et 25%
des plus de 85 ans, autant dire un véritable problème de
santé publique. Les patients atteints perdent
progressivement la mémoire et, à terme, souffrent d’une
perte d’autonomie totale.
De tels dégâts prennent naissance dans le lobe médian
temporal au niveau de l’hippocampe, siège de la mémoire
explicite. Celle-ci est directement impliquée dans la mise
en place d’associations et de nos souvenirs lointains (sens
des mots, évènements du passé, etc.), par opposition à la
mémoire implicite, inconsciente, et moins connue, qui
intervient dans les automatismes (faire du vélo, lacer ses
chaussures, etc.).
Or, une équipe de scientifiques américains a fait une
remarquable découverte en comparant les capacités de mémoire
implicite chez de jeunes adultes, des gens plus âgés et des
patients souffrant des premiers stades cliniques de la
maladie d’Alzheimer. "A
partir de cette étude, et d’autres que nous avons réalisées,
il apparaît qu’un certain nombre de réseaux neuronaux du
cerveau soient moins touchés dans la maladie d’Alzheimer que
ce que nous avions prévu"
explique Randy L. Buckner à propos de sa publication parue
le 10 juin dans la revue Neuron.
L’expérience consistait à présenter, aux 3 groupes de
volontaires, une série de mots. Il s’agissait de dire si
chaque mot représentait un sujet vivant ou non. Si les
jeunes étaient bien les plus rapides dans l’exécution de la
tâche, avec de l’entraînement, les 3 groupes réduisaient
considérablement leur temps de réponse !
L’analyse par IRM a permis de démontrer l’intervention du
cortex frontal dans le travail demandé. Par ailleurs, les
chercheurs ont découvert que la diminution de temps
nécessaire à la réalisation de la tâche était corrélée à une
réduction de l’activité du cortex frontal, signe qu’il
l’ajustait pour être finalement plus performant.
"Cette découverte laisse suggérer
qu’il y a un lien - bien que cela ne le démontre pas - entre
les diminutions d’activité du cortex frontal et ce type
d’apprentissage" insiste le
scientifique.
Les résultats sont prometteurs. Ils pourraient permettre
l’élaboration de programmes de rééducation, mieux
structurés, sollicitant les régions du cerveau encore saines
des malades atteints d’Alzheimer.
"Si vous dirigez la tâche et leur
fixez des objectifs très encadrés, cela aide les adultes
plus âgés à faire appel aux zones nerveuses encore
efficaces. Dans cette étude, nous avons montré qu’il était
possible d’exploiter les régions de haut niveau cognitif qui
présentent une fonction de mémoire préservée"
conclue Randy L. Buckner.


Maladie d’alzheimer. Coupe de cerveau
humain, atrophie corticale et dilatation ventriculaire.
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