Calcium et vitamine D en prévention des fractures : la fin d’un mythe ?
Date de création : 04 mai 2005
Le groupe britannique RECORD (pour Randomised Evaluation of Calcium or vitamine D) a initié un nouvel essai randomisé pour évaluer l’intérêt de suppléments en vitamine D et en calcium isolés ou associés cette fois-ci en prévention secondaire, c’est à dire chez des sujets a priori à plus haut risque fracturaire.
5292 sujets de plus de 70 ans non handicapés (85 % de femmes, âge moyen 77 ans) ayant été victimes d’une première fracture pour un traumatisme minime ont été randomisés en 4 groupes de traitement : 800 UI/j de vitamine D per os, un gramme par jour de calcium per os, les deux suppléments associés, un placebo. Les critères principaux d’exclusion étaient des troubles locomoteurs importants, une démence débutante, un cancer diagnostiqué dans les 10 ans, un traitement anti-ostéoporotique en cours ou une contre-indication à ces traitements. Il est important de signaler que la population retenue finalement ne représente pas la majorité de cette classe d’âge puisque 6197 sujets ont été déclarés inéligibles en raison de la présence d’un des critères d’exclusion. La durée moyenne de suivi n’est pas clairement précisée dans cette publication, la majorité des patients ayant été suivi moins de 48 mois.
Durant l’étude 13 % des patients ont présenté une nouvelle fracture ostéoporotique (dont 26 % au niveau de la hanche). Contre toute attente, aucune différence significative n’a été constatée entre les 4 groupes : 12,6 % de fractures chez les sujets assignés à un traitement par calcium contre 13,7 % chez les sujets n’en recevant pas (NS), 13,3 % chez les sujets assignés à un supplément en vitamine D contre 13,1 % chez les participants n’en recevant pas (NS), 12,6 % chez les sujets assignés à un traitement combiné contre 13,4 % dans le groupe placebo (NS). Aucune différence n’a non plus été relevée entre les 4 groupes lorsque seules les fractures de hanche ou les fractures confirmées radiologiquement étaient prises en compte.
La compliance aux traitements a été relativement médiocre (seuls 54,5 % des sujets prenaient encore les médicaments prescrits à 24 mois). Les effets secondaires, en particulier gastro-intestinaux, ont été plus fréquents avec les suppléments calciques.
Pour les promoteurs de RECORD, en toute logique, l’administration systématique de vitamine D et/ou de calcium ne peut plus être recommandée en prévention secondaire tout au moins chez des sujets âgés non handicapés. La préférence doit être donnée aujourd’hui aux traitements inhibiteurs de la résorption comme les bisphosphonates.
L’éditorialiste du Lancet, Philip Sambrook, tire des conclusions moins définitives de RECORD. Pour lui, il est possible que la mauvaise compliance constatée dans RECORD explique pour partie les résultats négatifs. De plus on peut envisager que de tels suppléments ne soient efficaces que chez des sujets réellement carencés en vitamine D, ce qui n’était pas nécessairement le cas de cette population, certes âgée, mais ambulatoire. Selon P Sambrook, de nouvelles études tenant compte du taux plasmatique de 25-hydroxy vitamine D sont indispensables avant de trancher définitivement. © Copyright 2005 http://www.jim.fr
Dr Anastasia Roublev
The RECORD Trial Group : “Oral vitamin D3 and calcium for secondary prevention of low-trauma fractures in elderly people (Randomised Evaluation of Calcium or vitamine D, RECORD) : a randomised placebo-controlled trial.” Lancet 2005, publication avancée en ligne le 28 avril 2005.
Sambrook P : “Vitamin D and fractures : quo vadis ?” Lancet 2005, publication avancée en ligne le 28 avril 2005.